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Lucien Clergue

 

photographie

Le Photographe Lucien Clergue, fondateur des rencontre d'Arles est décédé ce Samedi 15 Novembre 2014 à l'age de 80 ans.
Comme chaque année, le festival des Rencontres internationales de la Photographie est un rendez-vous estival,consacré à l'image fixe.
Si pour beaucoup, cet événement majeur de la vie artistique Française est une évidence, il faut saluer l'un de ceux qui a permis son éclosion.
C'est pourquoi, je vous propose de revenir sur la carrière de Lucien Clergue....

Il dit :« Je suis né le 14 août 1934 à Arles, à l'Hôtel-Dieu. Là où Vincent Van Gogh avait été interné. Cet hôpital est devenu des années plus tard l'Espace Van-Gogh où mes photos sont exposées aujourd'hui. Pour moi, c'est une manière de boucler la boucle.»

1938, alors qu’il n’est âgé que de huit ans, sa mère, lui fait donner des cours de musique.
C'est une discipline dans laquelle il excelle, mais qu'il est bientôt contraint d'abandonner.

Il rêve également de cinéma.

1948  il dit :« Ma mère m'offre un petit appareil photo en bakélite avec lequel je photographie ce que j'aime: ma mère et mon violon. J'ai 13 ans et ce sont mes premières images. »

Il acquiert ensuite un «Semflex», de format 6x6 pourvu d’une optique Saphir Boyer qu’il utilise jusqu’en 1960.

1944 Durant la seconde guerre mondiale, il est témoin de la destruction de sa maison familiale lors d’un bombardement.

Il grandit dans une famille de commerçants modeste.

Elève du lycée Frédérique Mistral, il interrompt ses études en seconde pour subvenir au besoin de sa famille, et cesse sa pratique du violon, bien que son talent de musicien lui permette d’envisager le Conservatoire, et peut être même une carrière de musicien.

photographie1949 il s’initie à la photographie, et durant l'année suivante, il photographie sa ville d'Arles.
Il côtoie les gitans, dont Manitas de Plata célèbre guitariste mondialement renommée.
Il assiste à des corridas.
Dans un de ses livres sur les gitans, il signe des images d’une grande force.

Il dit :« Ma mère meurt jeune, à 50 ans, après des années de maladie hantées par la mort. Adolescent, je devais laver son corps maigre, décharné. C’est peut-être la raison de mon goût pour les modèles aux poitrines généreuses, pour ces courbes féminines que j'ai découvertes grâce au décolleté profond de mon professeur de violon. »

Il travaille comme commis dans les magasins aux Lions d'Arles.
Il rencontre Jean-Marie Magnan, (écrivain), qui devient l’un de ses amis.

1953 , il raconte: « À la sortie d'une corrida aux arènes d'Arles, je mets mes photos sous le nez de Pablo Picasso. Il les regarde et me dit : Je voudrais en voir d'autres. Alors je me suis mis au travail pour lui, comme une obsession. Il a remplacé ma mère et mon père. Il était tout pour moi, l'Absolu.»

1954 il publie un livre d'une cinquantaine de portraits d'acteurs incarnant Jules César.  Il produit une série photographique de cadavres d'animaux morts et  se passionne pour la corrida.
Il commence à photographier des nus, dépassant les tabous qui existent autour de cette pratique .En dépit de sa timidité naturelle, il dévoile le sexe féminin, ce que les photographes de l'époque dissimulent d’un flou artistique.

Ses premiers clichés sont publiés dans le journal « Le Provençal », suivis de séries de photographies intitulé « Les Saltimbanques » prise dans les arènes d’Arles (1954), qui lui sont inspirés par le roman d’Alain Fournier « Le Grand Meaulnes », par la période rose de l’œuvre de Picasso, et la toile du peintre Fernand Léger, intitulé « grande parade » qui représente des enfants habillés en Arlequins.

Il rend visite à Picasso le 4 novembre 1955.

il déclare: « Poussé par la passion, par les mots de Picasso… je suis devenu photographe ».

Picasso lui présente Jean Cocteau en 1956.Ce dernier s’Inspire de ses photographies pour réaliser les fresques de la Chapelle Saint Pierre à Villefranche-sur-Mer.
En remerciement, le cinéaste  l'invite à exercer ses talents de photographe sur son film, Le Testament d'Orphée, tourné au Baux de Provence en 1959.
Le livre, projet originel mettra des années avant d’être édité chez Actes Sud en 2003, sous le titre “Phénixologie”.

Il expose ses photos à Zurich et à Cologne, puis à Paris dès 1958.
Il fait connaissance du Docteur Willy Staehelin à Zurich qui devient l’un de ces mécènes jusqu'en 1995, année de son décès.

Jean Cocteau lui présente Max Ernst,le peintre surréaliste qui lui achète des tirages de sa série sur les Charognes intitulé "flamants morts dans les sables".

Dès 1956 il trouve les sujets qui vont accompagner son œuvre.
« J’espère me montrer digne des sujets que j’ai choisis : la tauromachie, le nu, le paysage, mes principales sources d’intérêt. Mon souhait est de parfaire le langage de l’image, ne pas l’inféoder à des textes ou des idées, mais lui laisser dire ce qu’elle veut. Ce qui est admirable dans ce processus c’est qu’on apprend tous les jours, ce qui permet de se mettre à l’ouvrage avec encore plus d’envie chaque jour ». (Lucien Clergue, lettre à Carole Naggar, 1981).

Sa réussite artistique débute en 1957, lorsque les éditions Seghers publient son premier album de photos de nus, « Corps mémorable », dont son ami Picasso lui dessine la couverture.
Le livre s’accompagne des poèmes d'Éluard et d’un poème de Jean Cocteau, ce qui lui permet d’entrer dans le monde de l’art.
Il dit : « Chaque fois que je photographie une femme, j’ai l’impression de faire reculer la mort ».

A 27 ans, il peut enfin se consacrer à sa vie artistique, refusant une offre d’emploi "commerciale"de photographe de la part du magazine Paris Match.

Il dit: « Le 31 décembre 1959, j'arrête mon travail aux grands magasins aux Lions d'Arles. J'ai préféré travailler dix ans comme commis plutôt que d'essayer de vendre mes photos. Je voulais - et j'ai toujours voulu - garder une complète liberté de création. Mais là, je sens que je suis prêt à me lancer. D'ailleurs, je vais très vite gagner ma vie comme artiste, dès les premiers jours de janvier 1960. »

Edward Steichen lui achète 9 tirages en 1960, puis l’expose au Muséum of Modern Art de New York en 1961, ce qui assoit sa notoriété.
Il part sur les traces d’Edward Weston , (photographe américain)à Point Lobos, ou dans le désert de la Vallée de la mort, en Californie.
L’année suivante, c’est le musée des Arts Décoratifs, au Pavillon de Marsan du Musée du Louvre qui l’accueil.

photographie1965  il devient l’imprésario de son ami guitariste gitan  Manitas de Platas,rencontré en 1949.
« Je suis derrière le rideau du Carnegie Hall à New York où Manitas de Plata donne un concert. C'est une émotion inoubliable pour moi qui avais dû arrêter le violon, ce qui est resté comme un des grands regrets de ma vie. En m'occupant de Manitas, je vis une carrière de musicien par procuration.»

1968 «Mon film Delta de Sel est sélectionné au Festival de Cannes mais les événements de mai 1968 provoquent l'interruption du Festival. Aucun prix ne sera décerné cette année-là. Je retourne à la photo. »

Delta de Sel, est en concours également pour les Oscars.

1970 « Avec Jean-Maurice Rouquette, conservateur des musées d'Arles, et l'écrivain Michel Tournier, nous créons les Rencontres internationales de la photographie, premier festival consacré à la photo. J'y pensais depuis plusieurs années, inspiré par le Festival d'Avignon de Jean Vilar. »

1973 il débute comme professeur à l’université de Provence à Marseille.

1979 « Je soutiens ma thèse de doctorat en photographie. La discipline n'existait pas avant. J'en suis très fier, moi qui n'avais que mon brevet des collèges. La préface est le dernier texte écrit par Roland Barthes. »

1979 Il enseigne la photographie à la New York School for social Research.

Raymond Jean, et Roland Barthes sont les professeurs devant lesquels il présente  “Langage des sables”, sujet de la thèse qui lui vaut le titre de professeur es science en photographie.
Ses séries au titres évocateurs se succèdent : « Naissance de Vénus » (1965), « Nus dans la forêt » (1970) et  « Nus dans la ville »  (Paris, New York 1975) une trilogie mythologique.
Le corps se confond avec le paysage, et les éléments naturels se mêlent dans ses images.
Les paysages deviennent son  sujet à travers des séries sur les sables et leurs empreintes, « Langage des sables » un livre préfacé par Roland Barthes sort en 1980.
L’abstraction marque sa vision au travers de séries sur les sables et leurs empreintes.

1981 l’usage de la couleur apparaît dans sa photographie, avant qu’il fasse usage du   procédé Polaroïd.

1982, il raconte : « Le 9 mars 1982, le président François Mitterrand décide de créer à Arles l'Ecole nationale de la photographie, grâce à l'aide de Michel Vauzelle, alors porte-parole de l'Elysée. C'est une reconnaissance éclatante de la photographie. »

1990 début de ses séries «  surimpressions ».


1998  Baudoin Lebon devient son galeriste attitrée.

2003 Il est nommé chevalier de la Légion d’honneur.

2005, un livre intitulé « portraits » paraît aux éditions Actes Sud. On y découvre ainsi de nombreux clichés de peintres, qu’il a réalisé, comme Karel Appel, Bernard Buffet, Hans Hartung, David Hockney, Picasso, mais également des photographes, tels Ansel Adams, Manuel Alvarez Bravo, Henri Cartier-Bresson, Jean Dieuzaide, ou des musiciens, tel Pierre Boulez, Lionel Hampton, Yannis Xenakis, ou des comédiens comme Jean-Louis Barrault, Kirk Douglas, et Philippe Noiret.

2006 « L'Académie des Beaux-arts crée une section photographie et m'élit au premier fauteuil. C'est un moment historique pour la photographie.»

Lucien Clergue devient ainsi le premier photographe académicien. Il reçoit son épée et son habit le 10 octobre 2007, des mains de Christian Lacroix, qui est l’un de ses amis, en plus d’être le célèbre couturier arlésien mondialement connu.
Son épée d’académicien est gravée d’une phrase de Joseph Delteil, « l’œil est le prince du monde ».

Avec plus de 75 livres à son actif, un titre d'académicien,et une œuvre riche de plusieurs centaines de millier de négatifs, Lucien Clergue est non seulement un photographe renommée, dans le monde entier , mais il peut également s’enorgueillir, d’être l’un de ceux qui ont permis à la photographie, d’obtenir la reconnaissance du grand publique.

Au côté de Jean Dieuzaide, et de quelques autres, il a su se montrer comme l’un des plus fervents défenseurs, de cette art en devenir.

Les illustrations :

Visuel 1 : Couverture du film Lucien Clergue, à la mort, à la vie. Réalisation Elizabeth Aubert Schlumberger
Visuel 2 : Couverture de l'ouvrage Lucien Clergue de Lucien Clergue, Gabriel Bauret
Visuel 3 : Couverture de l'ouvrage Lucien Clergue. Née de la vague

Pour en savoir plus sur l'auteur de cette rubrique :

Chronique par Roland Quilici
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Au service de la photographie depuis 2001