« There is one thing the photography must contain, the humanity of the moment. » Bernard Frank
Bien qu’il n’ait pas bénéficié de la même médiatisation, j’allais dire de la « surexposition » des autres grands noms de la photographie, Albert Monier reste un des grands photographes du XXème siècle. Mais comme il le disait lui-même, « j’ai fait rentrer l’art dans la carte postale, et ça ils ne me pardonneront pas » !
Célèbre photographe d’art, Albert Monier naquit à Savignat, commune de Chanterelle (Cantal), le 3 mai 1915 dans une famille de paysans qui, comme la plupart de leurs compatriotes du Cézallier et de l’Artense, partaient à la mauvaise saison pour faire « marchands de toile ». Ses parents s’étaient établis à Pont-Audemer mais revenaient chaque été au pays.
C’est en 1934, à 18 ans, qu’il achète son premier appareil photo après. Il apprend la technique photographique de ses cousins. Délaissant le commerce de meubles qu’il avait créé à Pont-Audemer, il se passionne pour la photographie.
En 1948, il quitte la France pour deux ans et va parcourir le Maroc avec ses appareils, dont il tire de nombreux clichés sur la vie et la société marocaine.
En 1950, il regagne Paris et son Auvergne natale, pour se consacrer à l'art photographique et va séduire le public grâce à l'évocation et à la poésie qui empreint ses clichés. Exprimant le charme et la poésie de Paris et l’insolite de l’Auvergne qu’il parcourt Voigtlander au poing, ses oeuvres lui assurent une notoriété internationale : il exposera à New-York.
Il développe ses clichés d’une manière empirique à Savignat et retourne à Paris pour trouver un débouché. Il édite également ses photos en cartes postales, une innovation commerciale qu’il aura du mal au début à placer auprès des distributeurs et qui lui vaudront le rejet du milieu de la photographie d’art.
En mettant une légende à ses oeuvres, il associe les mots aux images. Autre innovation majeure pour l’époque, il lance le grand format photographique (40x50) et le poster. Plus de 80 millions de ses photos et 10 000 posters ont été vendus dans le monde entier et font le bonheur des collectionneurs. Certaines de ses photos illustrent des ouvrages d’écrivains tels que Henri Pourrat, son grand ami - qui a préfacé un livre de photos sur Paris -, Marie-Aimée Méraville, Jean Anglade , Pierre Moussarie.
Il est décédé le 21 décembre 1998 à Paris et repose en Normandie, au cimetierre de Maleville-sur-le-Bec dans l’Eure.
Classé comme un photographe « humaniste », Albert Monier est plus intéressé par les paysages et les attitudes des « petites gens » que par le portrait. Pour lui la photographie d’une scène ou d’un personnage n’est jamais que le reflet d’une intériorité. Les photographies d’Albert Monier procèdent d’une opération magique (chimique avec l’héliogravure) qui consiste à capter la lumière réfléchie par les êtres, les lieux, les scènes de vie.
Ces clichés sur le Maroc ou l’Auvergne sont une mise en image d’une réalité disparue, témoignage d’une époque et d’une société engloutie : ils constituent presque des études ethnographiques.
Une partie de son oeuvre est exposée dans un espace qui lui est dédié à Condat (Cantal) , ainsi qu’à Chanterelle dans l’authentique salle des fêtes de son village natal. D’autres œuvres originales sont conservées au Musée d’Art et d’Archéologie d’Aurillac. Une association se consacre à la valorisation de son oeuvre et à entretenir sa mémoire par diverses manifestations, expositions, conférences, éditions ou célébrations particulières : celles pour le centenaire de sa naissance en 2015 et le vingtième anniversaire de sa disparition cette année.
Auteur de l'article :
Jean François SERRE
Président de l’Association Albert Monier
http://albert-monier.fr/